U comme
UMMA | Les mûminûn […] constituent la nouvelle force politique qui va s’affirmer surtout à Médine, comme le prouve un document précieux connu sous le nom de Sahîfa ou Constitution de Médine. On y découvre comment Muhammad étend sa clientèle politique en contractant des alliances avec les tribus locales juives et arabes. Ceux qui entrent dans l’alliance constituent une confédération umma, au sens tribal qui évoluera, grâce au discours coranique, vers le concept de Communauté spirituelle transhistorique dont les membres se doivent une protection mutuelle, la garantie d’une sécurité = amân réciproque : ils sont, alors, mûminûn au sens sociopolitique tribal.
Mohammed Arkoun (« Islam et démocratie. Quelle démocratie ? Quel islam ? ») in Cités n° 12/2002 |
UN (L’~) | La richesse infinie aboutit à la dispersion ; la réalité la plus splendide manque d’absolu quand il lui manque le fondement de l’un.
Karl Jaspers (« Introduction à la Philosophie ») |
UN/MULTIPLE | Les forces de mort sont toujours des forces de division, d’éclatement, de dispersion. Les forces de vie sont, elles, des forces de rassemblement. Il va donc dans le sens de la vie de supposer que la vie et son fondement participent de l’Un et non du multiple.
Bertrand Vergely (« Les Philosophes du Moyen-Âge et de la Renaissance ») |
UNION | L'union entre l'homme et Dieu repose sur ce qui est commun à Dieu et à l'homme, c'est-à-dire l'esprit. Une fusion totale exigerait des êtres entièrement spirituels, puisque la matière sépare et crée l'incommunicabilité.
Marie-Magdeleine Davy (« Initiation à la Symbolique Romane ») |
UNION | Mais le sentiment intrinsèque, l’ineffable douceur et la parfaite union, tu ne pourrais l’expliquer avec ta langue, car elle est une chose finie.
Catherine de Sienne (« Le Dialogue ») |
UNION | Il est mort sans être mort celui qui a atteint les mesures de la perfection, car il vit en Dieu, auquel il est uni, comme ne vivant plus à lui-même. Il est aveugle, car il ne voit plus avec ses yeux physiques. Il a dépassé toute vision naturelle, car il a acquis des yeux nouveaux et meilleurs sans comparaison que ceux de la nature et il voit au-dessus de la nature. Il est sans activité et sans mouvement, car tout besoin d’agir est satisfait en lui. Il n’a plus de pensées, car il est parvenu à l’union avec Celui qui est au-dessus des pensées et il se repose là où il n’y a plus d’activité de l’intelligence, à savoir aucun mouvement pour la réflexion, le raisonnement et la conception ; il est incapable en effet de concevoir ou de définir l’impensable ou l’inconcevable et il est à ce moment comme dans un état de repos ; ce repos, c’est l’immobilité de l’insensibilité bienheureuse dans la sensation assurée des biens indicibles, où il se délecte évidemment sans effort.
Syméon le Nouveau Théologien (« Chapitres Théol., Gnostiques et Pratiques ») |
UNION AVEC DIEU | Dieu est, pour le Bhakta , l’image même de l’amour, de la compassion, du pardon et de la grâce. Il contemple son Dieu dans les profondeurs de son propre cœur. Il s’abandonne complètement en pensées, paroles et actions à son Bien-aimé et il L’adore avec une dévotion sans défaillance. Par une constante méditation sur le Seigneur, le Bhakta imprègne son être des divins attributs et atteint enfin un état de parfaite unité et d’union avec Dieu.
Swâmi Râmdâs (« Présence de Râm ») |
UNION MYSTIQUE | Au-delà de la tempérance rationnelle se trouve la mort spirituelle qui est sur un plan beaucoup plus élevé que la simple vertu ou la discipline éprouvée. La Croix du Christ entre alors dans la vie du contemplatif. Sans la mort mystique qui le sépare complètement des choses créées, il n’y a pas de parfaite liberté ni de progrès vers la terre promise de l’union mystique.
Thomas Merton (« Semences de Contemplation ») |
UNITÉ | Les êtres humains ont conscience d’un certain malaise inhérent à leur condition. Ils se sentent souvent « mal dans leur peau », désorientés, gênés avec les autres, déconnectés de leur nature intérieure. Notre existence pleine de complexité est jalonnée de conflits. Nous cherchons constamment à unifier la multiplicité des phénomènes qui nous entourent et à les réduire à un tout ordonné […] Cette pulsion vers l’unité qui semble fondamentale au fonctionnement de notre esprit ne peut que refléter, selon Plotin, l’essence des choses en général. Pour découvrir la réalité sous-jacente à la réalité, l’âme doit se refaçonner, subir une purification (katharsis) et s’engager dans la contemplation (theoria) recommandée par Platon. Il lui faut regarder au-delà du cosmos, au-delà du monde sensible et même au-delà des limites de l’intelligence pour plonger au cœur de la réalité. Il ne s’agit cependant pas d’une élévation vers une réalité située au-delà de nous-mêmes, mais d’une descente dans les replis les plus profonds de notre esprit.
Karen Armstrong (« Histoire de Dieu ») |
UNITÉ INTÉRIEURE | La vie tout entière est un apprentissage difficile pour faire son unité intérieure à partir de pulsions contradictoires. Nombreux sont les adultes qui renoncent à cette quête d’unité et se fixent sur une unité artificielle, sèche, volontariste, sclérosée, austère et culpabilisante… Pour ceux-là, le contact avec la fraîcheur et la spontanéité des jeunes est une épreuve terrible.
Stan Rougier (« L’avenir est à la tendresse ») |
UNITÉ/DIVERSITÉ | Il me semble que si le scientifique et le spirituel, l’ « En Avant » et l’ « En Haut », dirait Teilhard, doivent parvenir à se rejoindre, ce sera à travers une double mais convergente acceptation, celle de l’Unité, celle de la Diversité. Peut-être la première relève-t-elle davantage de l’intuition, et la seconde d’une constatation, mais elles m’apparaissent complémentaires.
Théodore Monod (« Et si l’Aventure Humaine Devait Échouer ») |
UNITÉ/PLURALITÉ | […] rappelons-nous le principe philosophique de toute structure organique : le tout dans son intégrité initiale et encore indifférenciée est toujours antérieur à ses éléments ; la pluralité en dérive en second lieu pour aboutir à l’unité, où chaque élément s’affirme dans toute sa valeur unique. Or, au cours de ce processus, la situation intermédiaire de la différenciation peut dégénérer, pour aboutir, à la place de la communion, à l’isolement, à la solitude, à l’extermination réciproque. La conscience malheureuse et coupable, pleine de nostalgie, témoigne du « paradis perdu », de sa virginité initiale encore inconsciente et fragile, quand Dieu, selon la belle image du récit biblique, dans la fraîcheur du soir, venait la contempler (Gn 3, 8).
Paul Evdokimov (« La Femme et le Salut du Monde ») |
UNIVERS | Ne dirait-on pas que les vieux Sages de ce pays, observateurs infatigables de la population céleste, avant même qu’ils eussent, aux temps hellénistiques, mué en astronomie savante leur astrologie empirique, avaient imaginé que le Ciel étoilé, avec ses astres et ses « figures », par eux depuis longtemps remarquées, identifiées et nommées, immuables dans leur silhouette et invariables dans leur mouvement éternel, constituait une manière de supra-cosmos parfait, modèle et patron impeccable de notre monde instable et fluctuant – quelque chose, si l’on veut, comme l’ « idée », au sens platonicien, de cet univers changeant et périssable. Si l’on voulait accuser la « transcendance » divine, comment ne pas prendre pour les images les plus appropriées des dieux souverains, cette population lumineuse du Ciel, éclatante et impassible ? Les étoiles, tout en participant quelque peu, par « contagion », de la nature divine, n’étaient point par elles-mêmes les dieux, mais le domaine des dieux, et aussi Leur image, plus pure, plus « religieuse », plus saisissante que celle tirée de la présentation et de la conduite des hommes. Les dieux, si l’on veut, constituaient une sorte de « troisième ordre » ontologique, au-dessus du stellaire, comme ce dernier au-dessus du terrestre.
Jean Bottéro (« La plus vieille religion – En Mésopotamie ») |
UNIVERS | L’unité, la beauté de l’univers, et de cette réduction parfaite de l’univers qu’est le temple de Dieu, ne résultent pas tant de proportions parfaites, d’un équilibre achevé, d’une géométrie absolue. Elles naissent plutôt de la manifestation, de la révélation, de l’expression d’une infinité de forces, d’énergies, de tensions, de poussées, mutuellement contrebalancées, contrebutées, compensées, contenues, arrêtées certes, mais que l’on sent toujours prêtes à renaître, à retrouver vie. Rien de moins statique que le macrocosme du Thoronet : à la croisée seulement du transept, se suspend et s’arrête, dans la verticalité enfin sauvée, l’eschatologique combat de la lumière et de la ténèbre, qui est le combat de l’architecte entre l’élévation et la pesanteur. Seulement alors les énergies cosmiques retrouvent les énergies divines.
Bernard Gorceix (introduction à Hildegarde de Bingen, « Le Livre des Œuvres Divines ») |
UNIVERS | L'univers est harmonie, puissance architecturale dans laquelle chaque élément occupe une place de choix ; la diversité ordonnée concourt à la beauté du Tout.
Marie-Magdeleine Davy (« Initiation à la Symbolique Romane ») |
UNIVERS | L’observation nous montre que toutes les galaxies s’éloignent les unes des autres. Le fluide-univers est en expansion comme un pudding aux raisins qui gonfle au four. Quelles sont les dimensions du pudding ? Il pourrait bien être infini… Ce mouvement d’expansion se poursuit depuis environ quinze milliards d’années. C’est l’âge de l’univers. Hubert Reeves (« Patience dans l’Azur », l’Evolution Cosmique) |
UNIVERS | Fille de Chaos, Nuit [Nyx] enfante, sans s’unir à quiconque, comme des émanations qu’elle tire de son propre fond, toutes les forces d’obscurité, de malheur, de désordre et de privation à l’œuvre dans le monde. Ces entités témoignent, par leur existence, de la nécessaire inclusion d’éléments « chaotiques » au sein de l’univers organisé. Elles sont comme l’envers de l’ordre, le prix à payer pour assurer l’émergence d’un cosmos différencié, l’individualisation précise des êtres et de leurs formes.
Jean-Pierre Vernant (essai introductif à la « Théogonie » d’Hésiode) |
UNIVERSEL | Affronté au monde extérieur, l’esprit humain n’a cessé d’osciller entre l’un et le multiple. Teilhard parlait du « grand et unique problème, celui de l’Un et du Multiple ». La connaissance dissèque, démembre, particularise : elle découpe en tranches, de plus en plus minces d’ailleurs, la réalité pour mieux en décrire, puis en expliquer, les éléments et les mécanismes. Elle s’enferme dans un pointillisme d’où s’est retiré le sens du cosmique, la fascination de l’universel, la nostalgie de la totalité, abandonnés aux poètes, aux artistes, aux mystiques.
Théodore Monod (« Et si l’Aventure Humaine Devait Échouer ») |
UTOPIE | L’utopie est simplement ce qui n’a pas encore été essayé.
Théodore Monod (« Révérence à la vie ») |